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Thibault Doidy de Kerguelen

Thibault Doidy de Kerguelen

Je suis président de la Compagnie Financière et Patrimoniale de Normandie. Vous pouvez me suivre sur mon site http://maviemonargent.info/

Mise à mort du dentellier Desseilles

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Plutôt les apparatchiks syndicaux que la vie de l’entreprise!

Une entreprise en difficulté

Le 22 décembre 2012, le dentellier calaisien, qui emploie 83 salariés dont 78 CDI, a déposé le bilan car il devait faire face à un problème de trésorerie dû à un gros impayé d’un client américain et à des reports de commandes de clients méfiants. Placée en redressement judiciaire, la société, qui fabrique du leavers haut de gamme, a été autorisée à poursuivre son activité, « Mais pas avec le nombre actuel de salariésLe président du tribunal l’a d’ailleurs souligné : nous avons une surcharge salariale qui s’ajoute à d’autres problèmes. Une réduction du personnel est nécessaire ».

Une procédure de licenciement

C’est le CE qui a voté les critères de licenciement (ancienneté, charge de famille, qualité professionnelle…). Les deux délégués syndicaux CFDT et CGT se sont abstenus de voter. Desseilles se sépare de neuf salariés : cinq tullistes-passeurs de chaînes, un remonteur, un wheeler-extirpeur, un comptable, un responsable du planning. Cinq des neufs licenciés sont des « employés protégés ». Ces licenciements sont pourtant validés par l’inspection du travail.

Une situation précaire

Le TC accorde un délai supplémentaire de six mois à l’entreprise pour stabiliser la situation. Des mesures d’économies sont mises en place pour limiter les stocks et protéger la trésorerie. Les dirigeants baissent leur rémunération de 25 %. Une recherche d’actionnaire se met en place. Une piste est trouvée en Chine.

C’est à ce moment que les cinq licenciés bénéficiant du statut de « privilégiés » décident de porter plainte et de réclamer auprès du tribunal administratif leur réintégration assortie d’indemnités. Le rapporteur public dépose en leur faveur.

La mise à mort

Le tribunal administratif de Lille oblige, dans une décision prise le 17 décembre 2015, l’entreprise à annuler le licenciement de quatre anciens syndicalistes, salariés protégés, et ordonne leur desseilles TAréintégration. Cette décision coûterait à l’entreprise près d’un million d’euros. Problème : elle n’a pas les moyens de payer. « Ça fait très mal, parce qu’on a un patrimoine, on a des belles commandes, on a un carnet de commandes qui se remplit très bien, et puis là, on va mourir pas par le travail, mais à cause d’une décision injuste « , se désole l’actionnaire Gérard Dezoteux.

En comptant les sous-traitants, 150 personnes (dont les 74 employés de Desseilles) pourraient perdre leur emploi d’ici fin janvier.





L’ actionnaire chinois s’est désisté

L’entreprise pensait pourtant être sortie d’affaire et éviter la liquidation grâce à un actionnaire chinois qui devait investir 700 000 euros. Un versement qui n’aura finalement pas lieu après la décision du tribunal administratif.

L’énergie du désespoir

Alors pour éviter la disparition de Desseilles, les salariés ont fondé un collectif. « On a bien l’intention de ne pas se laisser faire parce que ce sont nos emplois qui sont visés directement si l’entreprise ferme« , explique Renato Fragoli, le président de ce collectif baptisé « Les oubliés de Desseilles ». « Nos sous-traitants qui sont avec nous dans ce collectif vont être aussi impactés directement ». Aujourd’hui, actionnaires et salariés lancent un appel à Xavier Bertrand, prochain président de la région Nord-Pas-de-Calais / Picardie, pour les aider à sauver leur emploi mais aussi tout un savoir-faire.

Mais nous savons comment cela se termine toujours. L’énergie du militant ne peut rien contre le manque de fonds. Aucun nouvel actionnaire n’est à espérer tant que ce jugement restera exécutif, alors nous verrons naître une scop, une de plus, qui ne durera que le temps d’un feu de paille. Un par un les membres partiront, le manque de fond de roulement et de capitaux aura raison de l’énergie et de l’espoir, surtout si les méchants rapaces trouvent le moyens de prouver la continuité et réclament le transfert de passif.



Bref, encore une belle démonstration de cet état d’esprit propre au syndicalisme français qui fait que ceux qui s’y engagent sont toujours plus intéressés par leurs intérêts personnels que par la défense des intérêts collectifs.
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