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Zoom sur les holdings ISF après l'instruction fiscale de 2010

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La nouvelle instruction de janvier 2010 est venue compléter les textes existants sur la loi Tépa en apportant un certain nombre d’ajustements et de contraintes sur les holdings ISF.

 

Tout d’abord, ce qui ne changera pas. Les avantages de la holding sont confirmés : le taux de 75% de réduction, le plafond de 50 000 €, une mutualisation du risque par le nombre de participations prises (même si sur ce point, l’instruction fiscale va réduire les possibilités de mutualisation), et la durée d’investissement de 5 ans. Bien entendu, comme pour tous produits, un minimum de vérifications s’impose pour évaluer les qualités de l’équipe de gestion.

 

Ce qui change :

 

·         Instauration d’une limite à 50 actionnaires des holdings « passives »

·         Mandataires sociaux des holdings doivent être des personnes physiques

·         Il ne doit pas exister de mécanismes de sortie garantie

·         Une équipe de gestion peut gérer plusieurs holdings passives si elles ont des thématiques d’investissement distinctes

 

 

Comment va se répartir la collecte et quels seront les bénéficiaires de cette nouvelle donne : panorama de l’offre 2010.

 

A – Les FIP / FCPI / FCPR

 

Les fonds ne seront pas les gagnants de cette réforme. En effet, les FIP/FCPI des grands réseaux bancaires sont déjà « auto-bridés » car les équipes assurant la sélection des PME dans les banques ne sont pas suffisamment étoffées pour absorber une collecte plus forte. Par ailleurs, les taux de réduction en moyenne de 30% à 35% de l’ISF plafonnée à 20 000 € ne les rendent pas favoris pour cette campagne 2010 riche en nouveautés.

 

Le FCPR totalement investi dans le capital de PME, permet d’obtenir 50% de réduction avec une très bonne mutualisation des risques mais un plafonnement à 20 000 € d’ISF. C’est une excellente alternative pour les ISF inférieurs à 10 000 €. A ma connaissance c’est une offre encore peu développée à ce stade de la campagne 2010.

 

 

B - Le « direct intermédié » : les mandats de gestion et de conseil

 

Cette nouvelle formule va fortement se développer dans la prochaine campagne. L’investissement « direct intermédié » est le regroupement, via des mandats de gestion ou des mandats de conseil, de contribuables qui ne se connaissent pas entre eux, qui ne connaissent ni l’entrepreneur ni l’entreprise et qui se voient proposer d’investir directement dans le capital d’une ou plusieurs PME. Il se distingue de l’investissement direct où l’investisseur connait, en général, l’entrepreneur.

 

Attention, seules les sociétés de gestion agrées sont habilitées à offrir ce type de prestation.

 

Les souscripteurs auront donc intérêt à bien lire l’étendu du mandat concerné et surtout comprendre qui gèrera la sortie de l’investissement dans 5 ans pour éviter toute mauvaise surprise.

 

Zoom sur les holdings ISF après l'instruction fiscale de 2010 - Objectif Eco, anticiper pour s'enrichir

C - Les holdings

 

La limitation à 50 actionnaires des holdings passives va engendrer quelques modifications dans le paysage ISF 2010 :

 

1.       Tout d’abord, elle va limiter la taille de la collecte par véhicule. Une holding passive moyenne devrait collecter entre 1,2 M€ et 2 M€. D’où l’instauration d’un montant minimum de souscription pour rendre viable les véhicules, ce qui les réservera de facto aux contribuables payant plus de 15 000 € d’ISF.

 

2.       Le ticket moyen d’investissement dans les PME sera lui aussi revu à la baisse (vraisemblablement inférieur à 400 k€), ce qui aura comme conséquence de reconstituer l’equity gap en 2010.

 

3.       Il y aura une multiplication du nombre de holdings puisqu’il est expressément prévu dans la loi qu’une équipe peut gérer plusieurs holdings sous réserve qu’elles aient des thématiques d’investissement différentes. En 2010, il faudra encore plus de prudence dans la sélection des holdings, car la multitude est souvent propice à des abus  notamment aux démarchages par internet. L’ANH ISF tentera de constituer un rempart face à ce risque.

 

4.       La réduction de la mutualisation des risques poussera les contribuables à s’orienter naturellement vers les PME plus matures, notamment celles cotées sur des marchés non réglementés, sensées être plus sécurisantes et ce au détriment des PME de taille plus faible, plus anxiogènes. Inconnues du grand public, ce sont souvent elles, les plus prometteuses.

 

5.       L’éclosion d’une offre de holdings animatrices. Cette forme de holding peu utilisée en 2009 va se développer, car elle permet d’échapper à la règle des 50 actionnaires. Quelques nouveaux acteurs institutionnels se sont lancés dans cet exercice cette année, ce qui contribue à crédibiliser l’offre holding et apporte une solution d’investissement pour les souscriptions plus petites.

 

Sur quels arguments le souscripteur peut-il s’appuyer pour faire son choix entre les deux offres ? Chacune à ses avantages et ses inconvénients comme tente de le montrer le tableau ci-après :

 

 

Holding PASSIVE

Holding ANIMATRICE

Avantages

Mutualisation plus forte (3 à 5 lignes)

 

Frais beaucoup plus faibles

 

Sociétés plus matures donc moins risquées

 

Quote part investie : min. 90%

 

Seuil de souscription faible (2.500 €)

 

Pas d’obligation d’investir avant le 15 juin

 

Pas de limitation à 50 actionnaires

 

Taux de réduction 75% quelque soit la quote part de titres investie

 

Inconvénients

Taille limitée du fait de la contrainte des 50 actionnaires (moyenne 1,2 M€ à 2 M€)

 

Seuil minimum de souscription (20.000 €)

 

Obligation d’investir avant le 15 juin

 

Taux de réduction de 75% applicable sur la quote-part réellement investie (min. 90%)

Limitation à 2,5 M€ de collecte par an

 

Frais très importants (7 à 8%/ an) pour justifier le caractère « animateur » de la holding.

 

Quote part investie entre 70% et 80%

 

Profil plus risqué :

                Nombre de lignes limité (1 à 3) car pourcentage de détention par société d’au moins 25% pour justifier le caractère animateur,

                Ne s’adresse qu’à des sociétés très jeunes (prêtes à accepter (i) un niveau de frais élevés à payer à « l’animateur »et (ii) un financier dans son board qui détermine sa stratégie)

 

A chacun en fonction de son appétence au risque et de son niveau d’investissement de se déterminer. Comme pour les autres produits, mieux vaut ne pas s’arrêter à l’argument purement fiscal mais plutôt s’intéresser à l’équipe qui gère les holdings.

 

 

Enfin, cette nouvelle instruction fiscale ne va pas régler les problèmes de « fléchage » des fonds vers les petites PME.

 

Tout contribuable, s’il a le choix, préférera prendre le beurre et l’argent du beurre et nul ne peu l’en blâmer tant ce réflexe parait naturel à tous. C’est la même chose avec l’ISF, le contribuable s’orientera vers l’investissement qui lui paraitra le moins risqué (à juste titre ou non) et ce, indépendamment de l’instrument par lequel se fera l’opération. Nous pouvons déjà prendre le pari qu’une forte proportion de contribuables investira cette année dans le photovoltaïque, dans des sociétés immobilières et autres activités moins en rapport avec l’esprit de la loi plutôt que dans des PME innovantes et en croissance.

 

D’autant que ce réflexe est involontairement renforcé par Bercy. En effet, l’instruction fiscale prévoit que les holdings gérées par une même équipe de gestion ne peuvent pas co-investir dans les mêmes dossiers, sans préciser s’il s’agit d’opérations menées au cours d’une même campagne ou s’il s’agit de l’ensemble des holdings (y compris celles des années passées) gérées par une même équipe de gestion.

 

 

Ce qui se conçoit lors d’une même période de collecte (pour éviter la tentation de fractionner les investissements en plusieurs holdings de 50 personnes), est absolument incompréhensible et destructeur si on raisonne dans l’absolu. Car c’est la négation même du métier de capital risque qui consiste à accompagner les participations dans la durée et à répondre notamment à leurs besoins en fonds propres. Et en ce qui concerne les holdings cela ne peut se faire qu’à travers des véhicules de « millésimes différents ». Ne pas leur donner la possibilité de le faire, c’est s’exposer à des défaillances de participations, c’est pénaliser les acteurs qui jouent le jeu et qui investissent dans des jeunes PME qui, par définition, auront besoin de fonds supplémentaires dans les 12/18 mois qui suivent l’investissement de la holding, et au final c’est pénaliser les souscripteurs et les entrepreneurs.

 

L’ANH ISF a clairement posé la question à Bercy et espère que ce n’est que le fruit d’une rédaction un peu rapide d’une instruction qui sera corrigée. Sinon, les jeunes PME innovantes ne verront pas la couleur de l’argent Tépa qui leur était pourtant initialement destiné, de même que celles qui ont été financées en 2009 ou 2008 ne pourront pas trouver auprès de leur actionnaire le soutien financier qu’elles étaient en droit d’attendre en 2010 augmentant sensiblement leur risque de défaillance.

 

Comme le lecteur l’aura constaté, la complexité de la campagne 2010 est un vrai sujet qui, espérons-le, n’obérera pas la collecte globale. Il nous apparait nécessaire de nous battre pour défendre cette loi qui est une excellente idée et qui rend de grands services à nos PME. Il est tout aussi important que les autorités publiques prennent conscience des conséquences que les changements intempestifs de la législation ont sur le financement des fonds propres des PME.

 

Emmanuel GAUDE

Président de l’Association Nationale des Holdings ISF (www.anhisf.org),

Associé de Starquest (www.starquest-capital.com)

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