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Henri Dumas

Henri Dumas

Libéral convaincu,  je tire des expériences de ma vie une philosophie et des propositions.
Le tout sans prétention de vérité.
Mon blog : www.temoignagefiscal.com

 
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Après le gout du risque : la haine du risque

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Parole de vieux chnoque, en 1965, lorsque je me suis installé comme travailleur indépendant, le gout du risque faisait intégralement partie de notre ADN. Il rythmait la société et notre vie de tous les jours.

Pour comprendre physiquement le gout du risque il faut, par exemple, avoir fait de la moto sans casque, de la voiture sans ceinture de sécurité. Attention, je ne dis pas que c’est bien, que l’on doit y revenir, 14.000 morts par an ce n’est pas acceptable.

Je veux simplement parler d’émotion. Il m’arrive, par distraction, de quitter ma maison en deux roues tête nue, en oubliant mon casque, je m’en aperçois par un afflux inopiné de sensation de bien être. Je m’arrête immédiatement et retourne chercher mon casque, évidemment.

Car, il faut le dire, le risque c’est la perspective de l’échec, voire de la mort, mais c’est aussi la vie, sa densité, sa noble trajectoire. Le risque met en route les plus nobles facultés humaines, les plus fortes émotions.

Une société qui perd le goût du risque est mal en point, dépressive, mais une société qui est atteinte de la haine du risque est probablement gravement malade.

Or, la France affiche ostensiblement sa haine du risque, son mépris pour ceux qui en prennent, son refus de les récompenser, son souhait de les punir.

Essayons de comprendre ce qui s’est passé.

Ma génération, arrivée à la sortie de la guerre, a été élevée par des parents confrontés pendant la décennie précédente au risque. Un risque subi et non choisi.

De cette confrontation sont sorties deux mentalités, ceux qui avaient adoré le risque et en redemandaient, et ceux qui l’avaient haï et ne voulaient plus jamais en entendre parler.

En 1946 les premiers se lancèrent dans la vie sans filet, ce fut les trente glorieuses, les seconds inventèrent le statut des fonctionnaires ce sont les gagnants d’aujourd’hui.

C’est en 1946 que tout s’est joué.

En 1970, mes affaires marchaient à bloc. Le directeur des services techniques de la ville où j’habitais m’avait pris en sympathie. J’avais 26 ans et lui environ 56 ans. C’était un homme extrêmement brillant et très entreprenant. A cette époque, cette fonction faisait de vous un notable. Il était ingénieur des Arts et Métiers, je n’étais qu’un agréé en architecture en devenir.

Un jour de discussion amicale, je lui ai demandé pourquoi, avec une personnalité aussi forte et des compétences aussi développées, il n’avait pas créé un cabinet d’ingénierie.

Il m’a répondu ceci : « J’ai passé la guerre dans un camp de travail obligatoire, lorsque je suis revenu j’aspirais à la sécurité. Le statut des fonctionnaires m’a apporté cette sécurité ».

A la remarque : « Mais votre salaire est ridicule ». A l’époque les fonctionnaires payaient la garantie de l’emploi à vie par un salaire inférieur de moitié au secteur privé.

Il a répondu : « Je le savais en prenant ma décision, je ne vais me plaindre aujourd’hui ».  

A la deuxième remarque : « Mais vous n’utilisez pas plus de 50% de vos compétences, vous êtes entravé. « 

Sa réponse a été : « Effectivement, mais je compense par ma collection de timbre, qui est une des plus belle de France. »

Tout est dit. Les règles du jeu étaient posées.

Soixante dix ans se sont écoulés depuis la création du statut des fonctionnaires en 1946.

Au cours de ces soixante dix ans, une pression parentale forte a dirigé nombre de jeunes gens vers la sécurité de la fonction publique. Les parents comblés déclaraient : « Mon fils, ou ma fille, a réussi, il est à l’abri, il est fonctionnaire ».

La prolifération des adhérents à ce statut a fait que la compétition sociale s’est déplacée du monde du risque vers celui du statut sécurisé de la fonction publique. Ce statut est devenu le modèle pour tous.

Cela a entrainé une hiérarchisation liée au statut de la fonction publique qui très rapidement a rejoint le niveau des avantages résultant de la récompense du risque, pour aujourd’hui largement les dépasser.

Seuls les avantages liés au capital restent au dessus des avantages accessibles aux fonctionnaires, mais ceux-ci sont au combat pour les rejoindre et les dépasser.

Dans ces conditions la prise de risque ne reste que suicidaire, puisqu’elle n’apporte plus aucun profit. De ce fait, on peut affirmer aujourd’hui que la simple notion de prise de risque est quasiment éradiquée de la pensée des français.

Le problème est grave car ce n’est pas parce que la prise de risque est refusée, même pas identifiée, que le risque est pour autant supprimé. Il est simplement dissimulé.

Le risque, la mort donc, n’est pas détachable de la condition humaine, c’est une donnée universelle.

En faisant mine de le supprimer, le statut des fonctionnaires a introduit dans la société française le mensonge, l’aveuglement.

Une société qui se ment sur un point aussi fondamental, qui fuit la réalité du risque, va droit dans le mur.

Soixante dix ans parait la jauge naturelle de facturation des erreurs sociétales – voir l’URSS –

Nous ne devrions être pas très loin de la facture, de l’échec pur et dur.

Bien à vous. H. Dumas
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