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Charles Sannat

Charles Sannat

Charles Sannat est diplômé de l’École Supérieure du Commerce Extérieur et du Centre d’Études Diplomatiques et Stratégiques. Il commence sa carrière en 1997 dans le secteur des nouvelles technologies comme consultant puis Manager au sein du Groupe Altran - Pôle Technologies de l’Information (secteur banque/assurance). Il rejoint en 2006 BNP Paribas comme chargé d'affaires et intègre la Direction de la Recherche Économique d'AuCoffre.com en 2011. Il enseigne l'économie dans plusieurs écoles de commerce parisiennes et écrit régulièrement des articles sur l'actualité économique.

Charles-Sannat

La compétitivité culinaire

Audience de l'article : 2135 lectures
Nombre de commentaires : 1 réaction
Mes chères contrariées, mes chers contrariens,

Jusqu'à maintenant, ce qui était extraordinaire, c'est que j'avais toujours quelque chose à vous raconter le dimanche que vous pourriez lire le lundi matin. Eh oui, grâce aux sommets de l'ultime dernière chance, qui se tiennent le week-end, il y avait toujours plein de trucs à dire.

Là, rien. Que dalle, nada. Déprimant. C'est à cause de l'élection américaine. Il ne faut pas que nous autres, Européens, nous interférions dans les affaires intérieures de la puissante Amérique. En plus, si c'est pour se taper Romney et la clique néoconservatrice de « Deuble U Bush » (ce sont les mêmes derrières Romney) pour les 8 prochaines années, disons-le clairement, cela n'emballe pas les dirigeants européens... Ni ceux du reste du monde d'ailleurs.

Non, Obama, c'est vachement mieux, ou nettement moins pire, tout dépend comment on voit les choses. Bref, du coup, tout le monde retient son souffle, d'ailleurs on commence à se rendre compte que, finalement, Barack pourrait ne pas être réélu. Il faut dire objectivement que son bilan n'est pas hors norme eu égard aux espérances pour le moins excessives que son élection avait suscitées.

Bref, on s'emmerde.

Alors j'hésitais entre différents sujets aussi essentiels les uns que les autres. D'abord, je pouvais vous parler du mariage homosexuel. J'ai très envie de le faire bien que cela n'ait aucun impact économique. Néanmoins, c'est à la mode, et puis c'est fondamentalement un sujet très riche d'enseignement sur les évolutions de fonctionnement de nos sociétés, et cela a impact sur l'économie. Sinon, il y avait bien le dernier papier de ma copine Simone Wapler des Chroniques Agora, qui nous explique les signes à surveiller pour anticiper la faillite de la France. J'adore Simone... Donc ça, je vais vous en parler un peu, c'est très intéressant.
Autre idée : vous parler de mon week-end en famille et de nos choix culinaires. Vous pourriez me dire aucun rapport avec l'économie mais c'est faux.
Pour cause de vacances de la Toussaint qui ont été rallongées par notre ministre Peillon, et qui durent maintenant quinze jours, il faut bien occuper les bambins. Du coup, les parents (qui travaillent encore) sont obligés de trouver des solutions de garde. Là, les grands-parents interviennent. Du coup, les parents font des allers-retours, ce qui, somme toute, permet de participer au financement de la SNCF qui se gratte en ces périodes « blanches de forte affluence »... Bref, sur le Bassin d'Arcachon, nous mangeons des huîtres excellentes actuellement, nous dégustons des petits vins particulièrement goûteux aux prix très bas (dénichés chez des petits marchands de vins locaux), ainsi que des cannelés en dessert.

Et là, j'ai eu une révélation. C'est vrai que la compétitivité, ce n'est pas que le coût du travail. D'abord, sur ce plan-là, on sera toujours perdant par rapport au prix d'un Chinois, sauf à mettre nos salaires à leur niveau, ce qui n'est pas en soi une mauvaise idée, en tout cas c'est celle que l'on applique en Grèce. Regardez, un Grec est facturé désormais au prix d'un Chinois des villes, c'est-à-dire aux alentours de 400 € par mois.

Non, moi j'envisageais un débat sur la compétitivité mais en intégrant les capacités culinaires de chaque nation et là, franchement, avouez-le, notre patrimoine gastronomique ainsi que notre créativité culinaire font de la France le pays le plus compétitif sur ce plan.

Au menu ce soir

Si vous êtes en Espagne, vous n'aurez que quelques vagues tapas, avec de la paella et des tortillas. Évidemment, ce pays se retrouve entortillé dans les difficultés financières.

Si vous allez en Grèce, certes vous trouverez bien quelques olives vertes, ainsi que de la feta Salakis au bon lait de brebisses... Mais disons-le, là-bas, c'est vraiment la salade grecque, et les gens ne peuvent même plus se payer à manger.

Si vous allez au Royaume-Uni, le seul truc que nos amis anglais sachent encore cuisiner ce sont les hamburgers Mac Do, et malgré les mêmes recettes et méthodes, ils réussissent à en faire des moins bons. Non, ils n'ont aucun talent sur ce point et nous gagnons haut la main.

Si vous allez en Italie, là on commence à trouver des gens civilisés. Ha, cette Europe du Sud. Quel talent tout de même. Des pâtes d'une finesse exquise, des pizzas, bref, un véritable patrimoine, sans parler de leurs vins et de ces fameux petits chiantis pétillants ou non.

Si vous remontez vers l'Allemagne, là on se sent supérieur. Le seul avantage compétitif que possèdent nos amis germains, c'est la fête de la bière. Si vous voulez jouer à Vomitorix le Gaulois en Germanie, ce moment est fait pour vous. Pour le reste, la gastronomie allemande est aussi fine et délicate qu'une Angela Merkel faisant les comptes de ses voisins du sud.

La compétitivité hors coût, une chance pour la France

C'est pour cette raison que nous devons axer nos efforts sur nos points forts (leçon numéro un de toute bonne Business School).
Nous avons donc les musés, le patrimoine architectural (qui a toujours été construit à crédit d'ailleurs), des recettes de cuisine admirables, malgré une hôtellerie qui n'est plus de toute première qualité.
Comme quoi, le gouvernement a raison : regardons que ce qui est positif, c'est nettement mieux pour le moral.

Justement, à propos du gouvernement. Je vous parlais, au début, du dernier papier de Simone Wapler sur les signes d'une faillite de la France. Bon, en fait, comme Simone, je fais partie de ceux qui pensent que la France est déjà en faillite. La seule question est comment allons-nous l'officialiser et quand.

Les signes de la France en faillite

Pour la porte-parole du gouvernement, notre pays, comme nous l'avons déjà dit, est « en état de faillite aggravée ». Comme quoi, c'est déjà presque semi-officiel.

Pour Simone Wapler, il y a 4 signes avant-coureurs à surveiller de très près.

1 - Une nouvelle dégradation des obligations souveraines françaises

Maintenant que nous n'avons plus notre triple A (AAA) et que nous sommes passés « AA+ », une nouvelle dégradation pourrait accélérer la catastrophe. Les effets se feraient sentir sur les marchés, mais aussi à l'échelle politique et économique – puis à votre niveau, en tant que citoyen et contribuable.
Plans de rigueur, nouvelles mesures fiscales, faillites bancaires... Tout cela pourrait être au programme dans les mois qui viennent.
Surveillez tout nouveau communiqué des agences de notation comme du lait sur le feu.
C'est le risque de cercle vicieux à la grecque où chaque baisse de notation entraîne la nécessité de plus de rigueur, qui vient tuer tout espoir de reprise économique.
Les nouvelles augmentations d'impôts prévues en 2013 nous entraînent de toute façon tout droit sur ce chemin.

2 - Attention aux augmentations de capital de nos banques...

Le 22 septembre 2011, une note du FMI chiffrait les pertes potentielles des grandes banques européennes à 200 milliards – 300 milliards d'euros en incluant les banques locales des six pays en difficulté notoire : Grèce, Portugal, Irlande, Belgique, Italie, Espagne.
Les banques seront obligées de se recapitaliser. Mais n'oubliez pas qu'elles seront en concurrence directe avec les États sur le marché obligataire, pour lever des fonds qui se font de plus en plus rares.
Là encore, je ne peux que vous conseiller de garder un œil sur ces augmentations de capital : au moindre signe de difficultés, renforcez immédiatement vos mesures de protection financière.
D'ailleurs, il y a quelques jours, c'est l'ensemble du secteur français qui a été dégradé par les agences de notations qui sont également très inquiètes de l'effondrement annoncé du marché immobilier dans l'Hexagone.

Pour petit rappel qui a son importance, l'immobilier au sens large représente 20 % de notre PIB. Vous avez bien lu : 20 %. Le secteur de l'automobile est totalement anecdotique par rapport au poids de l'immobilier dans notre économie. Vous imaginez l'impact d'un krach dans ce secteur sur les comptes aussi bien des banques que de l'État. Catastrophique.

Mais rassurez-vous, la France ce n'est pas l'Espagne, ni les subprimes américaines. À moins que l'on ne vous ait pas tout dit, ce qui de vous à moi sera le cas, et Monsieur et Madame Toutlemonde vont rapidement le découvrir.

3 - ... sans parler du placement de nos obligations d'État !

Là encore, c'est un signal de faillite fort : le jour où le marché rechignera à nous prêter de l'argent en achetant nos obligations souveraines.
Nos dettes souveraines sont détenues à 65 % par des étrangers ; nous sommes donc dépendants de leur bon vouloir à continuer d'acheter nos titres – et donc financer nos déficits.
Or, avez-vous remarqué que ces derniers temps, malgré leurs belles promesses, les fonds souverains chinois ou qataris ne sont pas si pressés d'acheter notre papier ?
Si le FESF n'attire pas les foules empressées, cela laisse mal augurer des prochaines levées de fonds de l'État français qui est – répétons-le – garant du FESF.

En gros, l'idée c'est de surveiller les « adjudications ». Est-ce que les investisseurs achètent bien notre dette. Parce que s’il n'y a personne pour l'acheter... et bien cela signifie que l'on ne peut plus se financer...
C'est donc un point et un indicateur très important. On peut voir à travers ces opérations une dégradation éventuelle de nos conditions de financement.

4 - Le seuil fatal des 6 %

Dès l'instant où le rendement de l'emprunt dépasse les 6 %, la situation bascule. Le seuil a été fatal à la Grèce et au Portugal. Il a plongé l'Italie dans la tourmente. C'est à ce niveau que le point de non-retour est officiellement atteint et que l'on appelle le FMI à la rescousse. Dans notre cas, il en coûterait 30 milliards d'euros supplémentaires.
Nous en sommes à 2,2 % à l'heure où j'écris ces lignes. Mais une nouvelle dégradation n'est pas à exclure. Nous serions alors sur le fil du rasoir : restez attentif à tout frémissement à la hausse de cet indicateur extrêmement important.
Il est vital de vous tenir informé, afin de pouvoir agir rapidement et efficacement en cas de faillite déclarée de notre pays.
Parce que, comprenez-moi bien, les conséquences potentielles sont dramatiques pour vous, votre argent et votre mode de vie. Elles vont au-delà de l'inévitable effondrement du CAC 40, ou même de l'inflation galopante qui s'ensuivrait, laminant votre pouvoir d'achat.

Bien que pleinement d'accord sur ce point avec Simone, j'apporterais quelques menus compléments. En fait, ce seuil des 6 % est totalement empirique, c'est-à-dire qu'il correspond en effet à ce que nous avons pu voir pour l'Italie ou l'Espagne.

Compte tenu des spécificités françaises et de la taille de notre économie, il n'est pas sûr que ce seuil s'applique à nous. Pour tout vous dire, je pense que dès que les taux de la dette de notre pays dépasseront les 4 %, nous serons dans une situation très, très difficile, puisque cela serait déjà le double de ce que nous payons aujourd'hui.

A l'heure actuelle, nous continuons à emprunter à taux négatifs. Les marchés se sont plutôt montrés aimables et compréhensifs. Ils ont même laissé à notre nouveau gouvernement socialiste le temps de s'installer.
Pour ceux qui veulent bien entendre ce qui se dit outre-Rhin, nos amis germains semblent être en revanche à bout de patience.
Ils veulent des résultats et des efforts côté français. Du vrai effort, de l'effort qui fait mal, sinon pour eux ça ne compte pas.

Or François Hollande ne veut pas être le président qui fait mal.

Il est fort probable que les Allemands sonnent le début de la charge sur la France (après le 6 novembre), et Angela et ses sbires commencent déjà à en parler ouvertement, ce qui n'est pas bon signe.

Remarquez, les Allemands ont toujours eu un véritable avantage compétitif sur la façon de charger ses voisins. Déjà en 40, ils appréciaient notre gastronomie, notre vin, et nos monuments.

Comme quoi, au-delà de la blague, les choses n'ont pas changé depuis 70 ans. On ne rendra jamais la France compétitive comme l'Allemagne. En ce sens, effectivement mieux vaut essayer de jouer avec nos atouts. Mais ce n'est pas une raison pour ne rien faire.

Quoique, on peut aussi raisonnablement se demander s‘il y a encore quelque chose à faire...

Le problème c'est que la réponse ne fait pas plaisir à entendre, mais à regarder la politique de notre Président, j'ai l'impression que lui aussi attend... vu que de toute façon....

Bon et bien en attendant, moi je vais aller m'ouvrir une petite douzaine d'huîtres et puis j'ai un petit blanc bien sec à savourer sur tout ça... Tout ce qui est pris n'est plus à prendre.


Charles SANNAT
Directeur des Études Économiques Aucoffre.com
 

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1 Commentaire

  • Lien vers le commentaire alex6 lundi, 05 novembre 2012 22:28 Posté par alex6

    Pour ma part, je trouve que l'on mange de plus en plus mal en France. A chacun de mes passages dans l'hexagone, je remarque que la qualite baisse, que l'on se permet de servir des produits tres moyens mais a des prix tres eleves.
    La viande vendue en supermarche est meme franchement degueulasse comparee a ce que l'on peut avoir dans d'autres pays.