Pour rappel, Bitcoin est une monnaie numérique dont le comportement est entièrement indépendant de toute autorité centrale, et dont la sécurité repose non pas sur la confiance en chacun des participants mais sur des assurances mathématiques (preuves cryptographiques) que les transactions ont bien eu lieu. Cette monnaie s’est progressivement développée à partir de 2009, où un dollar achetait plusieurs centaines à plusieurs milliers de bitcoins. Depuis, cette monnaie, bien qu’ayant connu de fortes variations, s’établit à 650$ par bitcoin environ.

Cette bonne santé se traduit aussi par l’apparition de nouvelles entreprises, d’opportunités innovantes et d’avancées juridiques qui changent lentement la donne pour la monnaie numérique, la rapprochant tous les jours un peu plus d’un élément acceptable et accepté du public.

Dans le même temps, la Californie vient de passer une loi rendant le bitcoin et les monnaies numériques légales, essentiellement par abrogation d’une précédente disposition qui interdisait l’utilisation de tout autre moyen de paiement que le dollar. Pour le gouverneur californien Jerry Brown, il s’agit essentiellement d’entériner une situation déjà bien avancée puisque les résidents de l’État américain utilisaient de toutes façons déjà les monnaies numériques ainsi que tous les systèmes d’affiliation et de récompense commerciale (étoiles Starbucks, bons Amazon, etc…). De ce point de vue, les Californiens ne font ici que rejoindre les Canadiens qui ont choisi, plutôt que de combattre stérilement ou d’empêcher la monnaie électronique, de simplement lui assurer un cadre légal cohérent avec les pratiques en cours de développement. Évidemment, il ne faut pas se leurrer : ces légalisations ont d’abord pour but de tracer les utilisateurs afin de pouvoir les taxer, mais la démarche reste tout de même plus constructive qu’une interdiction.
La France n’est pas en reste. Bien que l’administration du pays soit particulièrement sclérosée, les bonnes volontés sont pourtant nombreuses et les initiatives dans le domaine du Bitcoin s’y développent malgré tout. Ainsi, Lodgis, agence spécialisée dans la location meublée à Paris, accepte à présent les paiements en bitcoins de la part de ses clients. Ainsi, on découvre au détour d’un article à la titraille facile, qu’un magasin vient d’ouvrir ses portes à Paris qui permet de rendre furieusement plus tangible la monnaie électronique en donnant la possibilité aux clients d’aller échanger, directement au comptoir, des euros contre des bitcoins, ou de les accompagner lors de la création d’un porte-monnaie sécurisé. Bref, des startups naissent, des commerces tentent l’aventure, à tel point que quelques acteurs du secteur Bitcoin lancent leur lobby en France, cherchant ainsi à contrebalancer les déclarations sidérantes de nullité de notre caste politique, ou les articulets mal boutiqués d’une presse subventionnée (en bon euros bien frais de l’État français, pas en bitcoin).

Bitcoin, et plus généralement, les monnaies numériques, gagnent en notoriété et s’installent dans les moeurs. Un long chemin reste bien sûr à parcourir, mais petit à petit, le rapport entre le nombre de commerces fragiles ou douteux et les commerces légitimes et socialement bien acceptés penche maintenant en faveur des derniers. Certes, il y a eu SilkRoad, place d’échange suffisamment anonyme pour permettre les achats d’armes et de drogues qui ont accolé Bitcoin à ces activités souvent illicites. Certes, on a assisté à l’épuration douloureuse de MtGox, cette plateforme d’échange qui a fait faillite avec fracas. Certes, la valeur du bitcoin a grandement fluctué ces trois dernières années. Mais ces étapes sont en réalité nécessaires (et il y en aura d’autres) avant de parvenir à un marché reconnu et suffisamment stable.
Et c’est parce que les pionniers s’en aperçoivent que les initiatives se développent, tant sur ce protocole et avec cette monnaie que sur d’autres, tant dans la partie purement monétaire que dans d’autres domaines (par exemple, les contrats dont les clauses – notamment financières – peuvent être sécurisées dans la blockchain de Bitcoin de façon simple, efficace et valide pour toutes les parties prenantes) on pourra noter le développement récent de Nxt, dont les buts et les fonctionnalités laissent présager de grandes opportunités.
En outre, je le redis : peu importe que ce soit BTC ou une autre monnaie qui finalement se taille la plus grande part de marché. Ce qui est essentiel, c’est qu’à présent, l’idée est implantée : non seulement une monnaie n’a pas besoin d’un État ni d’une centralisation, non seulement on peut départir la monnaie des mains des politiciens, mais en plus, par la concurrence introduite, on peut s’assurer que la monnaie ne devienne pas un instrument d’enrichissement au profit de quelques uns et au détriment de tous ceux qui ont l’obligation de l’utiliser. Mieux encore, cela renvoie les institutions financières à leur premier rôle qui n’est pas de créer de la monnaie, mais de favoriser l’épargne, favoriser l’investissement, calculer et prendre des risques. Enfin, le Bitcoin et les monnaies numériques donnent un moyen concret de résistance contre l’État et ses services fiscaux.
Et c’est de loin la chose la plus importante.