Voici divers scénarios envisageables pour les trimestres à venir, après l'épidémie.
On va commencer tout de suite par en éliminer un, auquel je n'ai jamais vraiment cru :
Celui du retour de l'épidémie et de la seconde vague.
Partout en Europe, en Asie, et maintenant en Amérique du Nord, on observe des courbes de ce type :
Avec une absence totale de rebond épidémique dans les pays qui ont confiné puis déconfiné leur population (on a maintenant plus d'un mois de recul en Allemagne).
L'hypothèse d'une épidémie saisonnière, qui disparaîtra d'ici la fin de l'année (hors petites résurgences locales et ponctuelles) est donc hautement probable, comme l'avait très bien vu le professeur Raoult, avec les dernières flambées épidémiques en Amérique du Sud.
Il y a plusieurs explications scientifiques possibles qui feraient que le seuil d'immunité collective soit bien plus bas qu'on ne le pensait initialement, peut-être inférieur à 10%. En voici quelques unes ici et ici (immunité croisée).
Voyons donc les scénarios restant possibles, dans un contexte où l'épidémie aura disparu presque totalement d'ici la fin de l'année.
1) Celui de la dérive vers la crise financière et économique prolongée.
C'est le scénario que je privilégie pour l'instant. Avant même le covid, les indicateurs (courbe des taux) annonçaient la fin de cycle et la récession. Le Covid n'a fait qu'accélérer de quelques mois son déclenchement, en la rendant beaucoup plus brutale.
A cause des choix désatreux et liberticides de nombreux gouvernements de confiner totalement leur population (pour une épidémie qui aura laissé plus de 99,95% de survivants en France,et encore plus ailleurs !), on va subir une récession sans doute supérieure à 10% du PIB sur 2020 dans une majorité de pays développés d'Europe et d'Amérique. En Asie le choc sera moins marqué. Le PMI manufacturier d'avril, à 41,6 a subi une chute modérée en Corée du Sud, qui n'a rien à voir avec les niveaux catastrophiques atteints en Europe où on se situe entre 30 et 35.
Dans tous les cas, une telle récession entraînera une cascade de faillite, une chute de la consommation importante des ménages et un creux d'activité sur plusieurs trimestres. Les actions des banques centrales (pour l'essentiel des injections de liquidités par rachat de prêts et garanties de prêts) ne sont pas des soutiens directs à la consommation.
Et jusqu'ici l'"helicopter money" (chèques consommations et prestations distribuées directement à la population) se fait à des montants nettement inférieurs à la perte d'activité.
Dans un tel scénario, la demande de pétrole rebondirait quand même rapidement, tirée par la fin des confinements partout dans le monde, et par le fait que la zone Asie a été nettement moins touchée. Elle pourrait s'établir d'ici quelques mois à un niveau simplement de 3 ou 4 millions de barils / jour en dessous de celui d'avant-crise, alors que l'offre a été réduite de plus de 7 millions, et que la production de pétrole de schiste US, étranglée par les prix bas, décroit au rythme de 1 millions de bpj en moins chaque mois actuellement.
- > Dans ce scénario l'offre deviendrait inférieure à la demande avant la fin de l'année, même avec une prolongation de la crise économique et la persistance de marchés baissiers. L'assèchement des stocks en excès surviendrait dans le courant de l'année 2021.
Le contexte redeviendrait donc favorable au pétrole assez rapidement, avec une hausse progressive des prix, ceux-ci restant toutefois modérés jusqu'en 2021 sans doute (mais largement suffisants pour que les pétrolières classique retrouvent une rentabilité correcte dès 2021).
Scénario 2 : Japonisation.
Ce scénario demanderait une forte entente politique (contrairement au précédent) sur la distribution forte d'"helicopter money" (plans type "Heroes act" à 3000 milliards de $ aux USA), et en même temps l'absence de réaction inflationniste au déversement d'argent gratuit.
Il déclencherait une reprise en V rapide, associé à un rebond de la demande en pétrole mondiale au niveau d'avant crise dès la fin de l'année 2020, et un niveau supérieur à celui d'avant-crise dès la fin 2021 tiré par les émergents d'Asie principalement.
On aurait ensuite comme avant une croissance molle et artificielle par une bulle d'actifs et des déficits publics sur la majorité des économies.
En raison de la forte chute de l'offre, de la situation financière désatreuse des producteurs de pétrole de schiste US et du gros retard à l'allumage des investissements pétroliers, il n'y aurait pas de redémarrage significatif de l'offre avant 2022 au moins, avec une probable explosion des prix pétroliers, à 100 $ / baril ou plus dès 2021. Cette hausse pourrait ressembler beaucoup au haut de cycle pétrolier post crise de 2009 (période 2011-2014), en plus fort.
Scénario 3 : Hyperinflation immédiate.
Ce scénario ressemblerait dans son début au précédent : fort consensus politique aux USA, en Europe et ailleurs sur un déversement d'"helicopter money" avec un "Heroes act" (ou une variante de même ampleur) accepté, et un équivalent adopté en Europe (il faudra beaucoup plus que les 500 milliards de Merkel et Macron !). La différence étant que cette fois les marchés perdraient confiance (ceci ne se contrôle pas) et que les monnaies seraient très fortement dévaluées.
Evidemment dans ce cas, inutile de vous dire que ce serait une issue optimale pour le pétrole, dont les prix exploseraient à la hausse tout comme ceux de l'or !
En conclusion
J'ai beau tourner le problème dans tous les sens, je n'arrive pas à imaginer dans le contexte actuel de scénario défavorable au pétrole (en dehors de celui hautement improbable de la grande seconde vague épidémique).
Tout au plus dans le scénario récessif, on pourrait avoir une petite rechute des cours du baril (et des actions pétrolières) d'ici la fin de l'année et / ou le début 2021. Mais à plus long terme, quasiment tous les scénarios pointent vers une demande qui croiserait assez vite l'offre à la hausse, donc vers une hausse significative des prix pétroliers.
Et lorsque je fais tourner les screeners d'analyse fondamentale, je vois clairement que les valeurs les plus décotées aujourd'hui sont les valeurs pétrolières, alors que ce sont pourtant celles qui sont sur un des secteurs qui devrait à priori s'en sortir plus vite que les autres.
Ajoutez à cela que le pétrole est un secteur "démodé", "mal vu" (chose que je recherche en général !)...que de nombreux investisseurs vont délaisser parce que comme vous le savez "le pétrole c'est has been, c'est très mal et vraiment pas bisounours d'investir là dedans quand de gentils khmers verts collectivistes vous expliquent que si vous ne vous convertissez pas à la religion écolo-décroissante, cela va causer au moins la fin du monde (ou de l'univers, je ne sais pas trop), créer d'atroces virus et autres punitions divines (tiens au fait c'est bizarre, il semblerait qu'un gros réchauffement climatique appelé "été" ait mis fin à l'épidémie en Europe. Il semblerait aussi que l'habitat dispersé, les voitures et transports individuels soient d'excellents moyens de distanciation sociale !)...
Et vous aurez une excellente recette pour la formation d'une belle anomalie de marché !