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Productivité

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Augmenter la production agricole ne résoudra peut être pas le problème de la faim dans le monde - le stockage et le climat sont les vrais problèmes

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D’après la Banque mondiale, nous devons accroitre notre production de nourriture de 50% d’ici à 2050, si l’on veut nourrir 9 milliards de personnes, tout en trouvant des moyens pour réduire les émissions de carbone issues de l'agriculture.

Dans le même temps, on ne tient pas compte d’une donnée essentielle et simple : nous produisons déjà assez d’aliments pour nourrir 10 milliards d’individus.

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La faim fait plus de mort dans le monde que le paludisme, la tuberculose et le Sida réunis.


Mauvais stockage au Sud et gaspillage au Nord


Monde FAO production aliment perte total - Copie
Cependant, une combinaison néfaste, entre les pertes liées au stockage après la récolte, la surconsommation et le gaspillage, conduit à ce que près de 800 millions d’êtes humains souffrent de malnutrition dans les pays en développement.

Les pertes liées au stockage affectent principalement les pays du Sud. En 2011, la Banque mondiale déclarait : « Le monde semble avoir oublié l'importance des pertes de produits alimentaires après récolte dans le secteur des céréales de l'Afrique ». Surconsommation et gaspillage, quant à eux, sont principalement l’apanage des pays du Nord.

Le défi qui consiste à nourrir le monde ne se réalisera tout simplement pas grâce à l'augmentation de la production. D’ailleurs, c’est précisément comme cela que la soi-disant « révolution verte » a créé nos problèmes actuels.

La réponse réside dans l'augmentation de la résilience de l'agriculture au changement climatique, de manière à inverser la catastrophique dégradation de l'environnement au cours des 50 dernières années, tout en rendant la production plus efficace.
Cela passe également par une amélioration des conditions de stockage des denrées agricoles, particulièrement en Afrique.


En Afrique subsaharienne, les pertes en grains atteindraient 4 milliards de $

Stockage afrique Fao
Stockage du maïs sur pilotis pour protéger les grains des assauts des ravageurs (Nigéria).

L'investissement dans des technologies post-récolte pour réduire les pertes de denrées alimentaires entraînerait une augmentation notable des approvisionnements alimentaires en Afrique subsaharienne, selon un rapport de 2011 de la  Food Agricultural Organisation (FAO) et de la Banque mondiale.

Les denrées alimentaires perdues pourraient combler les besoins minimum annuels d'au moins 48 millions de personnes. Si nous voulons que des systèmes agricoles durables se développent pour nourrir 9 milliards d'habitants d'ici à 2050, la conservation des pertes alimentaires à travers toute la chaîne alimentaire doit être un pilier essentiel des futures stratégies alimentaires nationales.

Selon les estimations du Système d'information africain sur les pertes post-récolte, les pertes en grains qui surviennent avant les procédés de traitement et de transformation varient de 10 à 20 %. Rien qu'en Afrique orientale et australe, les pertes sont estimées à 1,6 milliard de $ par an, soit environ 13,5 % de la valeur totale de la production de grains.

Bien que des estimations régionales similaires ne soient pas disponibles pour l'Afrique centrale et de l'Ouest, en supposant que les pertes y atteignent le même ordre de grandeur, la valeur totale des pertes post-récolte en Afrique subsaharienne serait de 4 milliards de dollars par an pour une production totale annuelle évaluée à 27 milliards de dollars (moyenne annuelle 2005-2007).

C'est, en gros, l'équivalent de la valeur totale des importations céréalières de la région durant la même période. Et comme les prix des céréales ont pratiquement doublé depuis 2005-2007, la valeur des pertes actuelles serait bien plus élevée.


Augmenter la production ? Une très mauvaise idée

La révolution verte qui a eu lieu dans les années 1960, avec l'augmentation de la production céréalière dans les pays en développement, est pourtant créditée d’un sacré bilan : un milliard de vies sauvées. Mais aujourd'hui, le bilan environnemental de ce boom agricole n’est que trop évident.

Les statistiques sont sans appel :

38% des terres arables de la planète sont dégradées

11% de la superficie irriguée est contaminée par le sel

90% de la biodiversité des 20 principales cultures de base a été perdu

Les engrais azoté produisent 6% de l'effet de serre…

Et leur ruissellement transforme 400 aires marines en « zones mortes » (zones où la concentration d'oxygène est si faible que la vie animale étouffe).

Pendant ce temps, plus de 350 000 personnes meurent chaque année à cause de la toxicité des pesticides.

D’après les recherches sur les limites que la planète peut endurer, on estime que l'utilisation d'engrais azotés doit diminuer de 75% pour éviter un impact environnemental à grande échelle.

L'accent mis sur la productivité et les rendements a fait que la quantité d'énergie nécessaire pour faire pousser la même quantité de nourriture a augmenté d’1/4 à un 1/3 au cours des 25 dernières années. Même sans le changement climatique, l'agriculture chimique classique est le moteur qui conduit l'humanité vers le précipice en termes de sécurité alimentaire.


Les petits agriculteurs produisent 50 % de la nourriture de la planète


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L’ONG Christian Aid souligne que si nous voulons inverser cette tendance dans le contexte du changement climatique, l'agriculture a besoin d'un changement en profondeur dans la façon dont elle aborde la résilience climatique.

Les petits exploitants, agriculteurs et éleveurs, qui gèrent 60% des terres agricoles et produisent 50% de la nourriture de la planète, doivent être au centre de ce programme. Les recherche pour résoudre leurs problèmes devraient être guidés en fonction de leurs priorités, et doivent se dérouler avant tout sur leurs exploitations.

Les soutiens dont les agriculteurs veulent, comprennent des conseils sur la gestion et la protection des sols, des essais de nouvelles solutions, des prévisions climatiques fiables, et le développement de leurs propres processus de semences et d'élevage. Pour l’instant, les conseils qu'ils obtiennent habituellement tournent autour d’inabordables engrais et pesticides chimiques. D’ailleurs, leur capacité d'échanger et de vendre des semences adaptées localement est menacée par une législation - inspirée par des multinationales - qui promeut des variétés de cultures développées dans des laboratoires de biotechnologie lointains.

Sans compter que les conseils que l'on donne, vont souvent à la mauvaise personne. A travers le monde, des petits bouts de femmes gèrent jusqu'à 90% de la production des aliments de base. Hors, seulement 15% des conseillers agricoles sont des femmes, et seulement 5% de ces précieux conseils atteignent ces femmes.


Entre 50 et 80 millions d’ha dans les mains d’investisseurs étrangers


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Pour que les agriculteurs se mettent à investir dans la résilience, ils ont besoin d’une sécurité foncière, en particulier quand ils sont impliqués dans des régimes fonciers communaux. Entre 2006 et 2011, la FAO a constaté qu’entre 50 et 80 millions d’hectares ont fait l’objet de négociations avec les investisseurs étrangers. Non seulement cela dépossède les agriculteurs, mais cela dissuade également les autres de la nécessité d'investir dans des mesures visant à lutter contre l'érosion des terres, à protéger les arbres, ou toutes les autres formes d’initiatives qui paient sur le long terme.

Les activités qui dégradent les sols, les forêts et autres ressources vitales, comme les bassins versants et les cours d’eau, se traduisent inévitablement par une plus grande vulnérabilité en aval, créant des inondations. Par contre coup, l’exposition accrue aux cyclones et à la sécheresse de ces zones devient plus intense, ce qui affectent en retour la production alimentaire.


Eliminer la faim dans le monde d’ici 15 ans


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La bonne nouvelle c’est qu’en stimulant les agriculteurs afin de développer une agriculture résiliente au changement climatique, il est possible d'envisager l'élimination de la faim dans le monde en 15 ans. La préservation des ressources et l'utilisation d'approches respectueuses de l'environnement, des améliorations telles que l'agriculture de conservation, l'agroforesterie et la gestion intégrée des ravageurs, ont démontré produire plus - tout en améliorant de manière significative la résilience face à des extrêmes climatiques -, que l'agriculture chimique et classique. Des pratiques qui permettent également de réduire les émissions de gaz à effet de serre.

En outre, l’amélioration de l'accès aux marchés peut transformer l'agriculture en un moteur qui entraînera les économies rurales, vers un développement diversifié et véritablement durable.

L'appel de la Banque mondiale pour « une agriculture intelligente face au climat » met l'accent sur l’utilisation durable de l'eau, la lutte contre l'inégalité entre sexes, et des recherches accrues.

Il convient également de souligner la nécessité d'une approche véritablement tridimensionnelle, afin d’inverser la dégradation de l'environnement et le changement climatique. Une telle approche doit inclure un renforcement des garanties sociales pour s’assurer que les prêts consentis permettent, au lieu de saper leur volonté, la résilience climatique chez les petits exploitants et les modestes éleveurs des pays en développement.

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