Vous n'êtes pas membre (devenir membre) ou pas connecté (se connecter)
Gilles Lerat

Gilles Lerat

Ingénieur de formation, j’ai sauté dans le bain de la création d’entreprises dès ma sortie de l’école. Je me suis spécialisé dans la sécurité informatique. Après avoir revendu ma société à un groupe informatique, je me suis dirigé vers le cinéma, ce qui n’est peut-être pas la meilleure option, compte tenu de l’environnement économique actuel.

Je suis à la fois émerveillé en permanence par les prouesses technologiques actuelles et extrêmement inquiet des défis qui nous attendent sur les plans énergétiques, économiques, et surtout sur le plan démographique.

Créer une SSII en France et réussir - dossier spécial partie 8 et conclusion

Audience de l'article : 7390 lectures
Nombre de commentaires : 1 réaction
Etape 7 : revente et perspectives.


Préparer la vente de l'entreprise.

Le
processus de revente doit être anticipé au moins 1 à 2 ans en avance.

N’oubliez pas de transformer votre SARL en SAS voire en SA avant la cession : les droits d’enregistrements sont de l’ordre de 3% dans le cas d’une SARL (après un abattement de 23 000 Euros).
Dans le cas d’une SAS ou bien d’une SA, ils sont de 3%, plafonnés à 5 000 € par mutation.
Ces droits d’enregistrement sont typiquement payés par l’acquéreur, qui vous saura gré, pécuniairement parlant, de lui avoir évité de les payer. Et s’il oublie d'être reconnaissant (ce qui sera le cas), ce sera à vous de faire valoir ce point pendant les négociations.

Contrairement à une idée assez répandue, les acheteurs ne sont pas vraiment intéressés par le niveau de cash disponible à l’instant T de l’entreprise. C’est même quelque chose qui peut les gêner. Si vous avez beaucoup de cash dans l’entreprise, sortez-le (par une distribution de dividendes).

Si vous souhaitez que cet argent soit toujours disponible pour l’entreprise, versez-le vous en dividende, et réintégrez le dans l’entreprise par apport en compte courant d’associé, qui sera rémunéré.
C’est l’un des placements les plus sûrs que vous puissiez avoir pour votre argent, dans la mesure où vous êtes bien placé pour savoir si votre entreprise est pérenne ou pas.

Dans le cadre du rachat d’une entreprise, l’acheteur regarde 3 choses :
  • Le niveau d’intégration de l’entreprise : comment a-t-elle réussi à se structurer pour ne pas être handicapée par la suite par le départ du ou des fondateurs.
  • Les perspectives du secteur et les perspectives de l’entreprise en particulier dans ce secteur, par rapport à ses principaux concurrents.
  • Sa capacité à générer du cash, et le niveau de synergie que peut apporter un acquéreur plus important.

Pour une SSII « classique », la valorisation est basée sur un multiple fluctuant entre 0,5 et 2 fois le chiffre d’affaires, et de 5 à 10 fois le PER.
Et oui, ce n'est pas énorme... Et ce niveau va aller en se contractant encore. En période d'exhubérance, on peut voir des achats à plusieurs fois (ou plusieurs dizaines de fois) le chiffre d'affaires. 

Avec la crise, les acheteurs vont de plus en plus se focaliser sur le PER. Etes-vous confortable avec l’idée de revendre votre entreprise à un PER compris entre 6 et 8 ? Si ce n’est pas le cas, continuez de travailler…jusqu’à ce que vous deveniez confortable avec la valorisation.

Une société prouvant que son acquéreur lui permettra de disposer d’un effet de levier important dispose d’un atout très fort dans la négociation.

Bien entendu, l’essentiel des négociations se focalisera sur le prix de vente.

En fait, ce sont les petits détails à côté qui souvent, vont faire la différence, et qui justifient que l’on se batte pour avancer sur le sujet. 

Par exemple :

La garantie de passif .
De combien est-elle ? Et surtout, chez qui est-elle logée ? En tant que vendeur, vous devez demander à ce qu’elle soit sur votre compte bancaire, avec un nantissement de la banque en faveur de l’acquéreur.

En cas de procédure mettant en œuvre la garantie de passif, l’acquéreur demandera à être certain d’être payé : on parle ici de la garantie de la garantie.

La garantie de passif fait appel à 3 principes : le seuil, la franchise et le plafond.

Le seuil : le montant minimum des « affaires » sujette à litige, en dessous desquels, l’acquéreur n’essaie même pas de faire jouer la garantie de passif.

La franchise : c’est le montant cumulé que doivent atteindre l’ensemble des affaires avant de démarrer la garantie de passif. Autrement dit, l’acquéreur ne vous reprend pas une partie de votre prix de vente avant d’avoir atteint le montant de la franchise.

Le plafond : c’est le montant maximum de la garantie de passif que l’acquéreur pourra exiger. On peut dire aussi qu’il s’agit du prix maximum que le vendeur peut être amené à reverser à l'acquéreur.

Par exemple, si vous avez un seuil de 2000 € H.T., une franchise de 5000 € H.T. et un plafond de 50 000 € H.T., cela veut dire que pour toutes les affaires inférieures à 2 000 € H.T. (ex : factures client non réglées), l’acquéreur ne sera même pas en situation de regarder cette garantie de passif.  Les affaires supérieures à 2 000 € H.T. seront additionnées jusqu'à ce qu'elles dépassent 5 000 € H.T. A ce moment-là, la garantie commencera à courir (à compter du premier euro !) et jusqu'au montant maximum du plafond (ici, 50 000 € H.T.).

Les modalités de versement.
L’acquéreur va vous proposer un certain prix de rachat, et des modalités de versement, en essayant de faire en sorte au maximum que les dates de versement soient le plus éloignées dans le temps.  A vous de faire pencher la balance de l’autre côté.

La durée minimale pendant laquelle le dirigeant s’engage à rester dans la société.
En général, plus la société est petite, et plus l’acquéreur doit s’engager à rester dans la société pour faciliter la transition. Le non-respect de cette règle par le vendeur peut être un motif pour mettre en œuvre la garantie de passif.

Le complément de prix.
Pour des sociétés de service, il est d’usage de proposer un complément de prix, fonction des résultats d’exploitation que vous aurez pris soin de promettre à votre futur acquéreur. C’est pourquoi, il est préférable de rester réaliste lors de l’appréciation de ces bénéfices. Outre qu’une telle attitude sera appréciée, votre réalisme vous permettront de rester inflexible sur les autres  aspects de la négociation.

Votre salaire en tant que dirigeant.
En ces temps troublés, il peut être intéressant de concéder un prix de vente moins avantageux en échange d’un salaire fixe plus attractif.


Pendant la revente, ne négociez surtout pas les points litigieux (garantie de passif, seuil, plafond) directement avec votre acquéreur.
Laissez un avocat s’occuper de ce genre de détails : cela permettra de conserver de bonnes relations avec votre acquéreur, avec lequel vous serez de toute manière amené à travailler par la suite.

Pour anticiper sur la revente, il peut-être préférable pour les fondateurs de se doter d’une holding, s’ils ont l’intention de créer d’autres entreprises par la suite. Je dirais qu’actuellement, c’est obligatoire : le gouvernement socialiste reviendra très prochainement sur les promesses faites au Pigeon, et l’imposition sur les plus-values reviendra à 62%.
Attention, depuis peu, pour que ce principe de non-imposition des plus values soit accepté par le fisc, vous aurez obligation de réinvestir plus de 50% du fruit de la vente dans un délai maximal de 2 ans dans une activité commerciale ou industrielle (pas question d'acheter ce super appartement au pied du Trocadéro dont vous rêviez). Bien sûr, il y a des possibilités pour contourner cela légalement, et je vous en reparlerai par message privé, si vous êtes intéressé.




Perspectives.

Les perspectives de l’économie mondiale sont franchement mauvaises, mais l’informatique est devenue indispensable pour faire tourner l’économie.
Il y a donc encore de belles entreprises à monter autour d’un service de qualité, et cela pour de nombreuses années.

L’informatique est délocalisable, et ce concept marche aussi dans l’autre sens. En d’autres termes, cela permet de travailler plus facilement sur d’autres territoires que la France, sans nécessairement y être implanté. Du temps de ma petite société, nous réalisions pratiquement 40% de notre business à l’étranger, majoritairement en Afrique.


Un mot de conclusion.

On a parfois l’impression que la création d’entreprise est plus risquée aujourd’hui qu’il y a 15 ans.

En fait, si l’on fait le compte des avantages et des inconvénients, pour une société de services informatiques, la création et le développement ont été vraiment facilitées depuis cette période, tant vis-à-vis des relations avec l’Etat que par la démocratisation d’un certain nombre de services (voix sur IP,…)

Pour considérer qu’elle a réussi son année, une SSII ne doit pas seulement réaliser une évaluation de ses performances d’une année sur l’autre. Elle doit également regarder la croissance du secteur dans lequel elle opère.

Une petite SSII (jusqu’à 50 personnes) devrait toujours croître plus vite que son marché. Sinon, la stratégie n’est pas bonne.



De nombreux facteurs participent du succès ou de l’échec de l’entreprise. Si nous devions résumer les principaux facteurs, nous indiquerions en priorité (décroissante) : 

Ø  La qualité du personnel : et en priorité, sa polyvalence, son autonomie, son esprit d’équipe et son enthousiasme.
Ø  La méthodologie : plus précisément, la capacité à définir une stratégie correcte et à s’y tenir. 
Ø  L’ouverture d’esprit : la capacité à saisir les bonnes tendances, les partenaires clés, et les concepts dans l’air du temps.
Ø  L’ambition : croître, c’est prendre un pari sur la santé future de l’entreprise. Il faut une bonne dose d’ambition pour s’y risquer, tout comme il faut de l’ambition pour simplement créer une entreprise.



Poster un commentaire

1 Commentaire

  • Lien vers le commentaire CB mercredi, 10 juillet 2013 15:23 Posté par sehinz

    Un énorme merci à toi Gilles de nous avoir fait partager ton expérience d'entrepreneur SSII.

    J'envisage aussi de créer à moyen terme une entreprise, pas forcément SSII, mais au moins, grâce à toi je saurai à quoi m'attendre.

    Merci encore !