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H16

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Je suis naturellement grand, beau, j’ai le teint buriné par le soleil et le sourire enjôleur et des mocassins à gland, un très gros zizi et une absence totale de lucidité sur mes qualités et mes défauts !

J'ai un blog sur lequel j'aime enquiquiner le monde : Petites chroniques désabusées d'un pays en lente décomposition...

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Crimes sans victimes (1) – Propriété privée, mais pas trop

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Il y a quelques années, Mickaël et Émilie Bonami achètent un terrain de 1500 m² cerné de végétation, bordant la route du hameau d’Étables, à Charrais, dans le département de la Vienne. Depuis 1987, le terrain acheté contient un mobile-home. Mickaël y installe sa famille. Grossière erreur.

Tout avait pourtant bien commencé puisque personne ne semblait se plaindre ni du terrain, ni des propriétaires, ni même de la présence du mobile-home depuis près de trente ans. D’ailleurs, Mickäel n’aura aucun souci pour obtenir une adresse postale, un raccordement à l’eau courante et à l’électricité.

Et du reste, pourquoi pas ? Après tout, le gouvernement, l’administration et tout l’État s’est officiellement fixé pour mission de donner un toit à tous les Français, de combattre le fléau du mal-logement, de la croissance alarmante des vagabonds sans domicile et des loyers trop chers. Certes, les résultats de cette lutte permanente contre l’appauvrissement ne sont pas encore très probants, mais on ne peut douter que le gouvernement, le ministre Cosse ou même son prédécesseur Duflot aient cette priorité de donner à tous un logement décent chevillée au corps.

Malheureusement, Mickaël aura eu la mauvaise idée d’avoir des enfants (chose que, pourtant, le gouvernement, l’administration et tout l’État encouragent officiellement à coup d’allocations et autres primes plus ou moins généreuses). Pour loger sa famille qui s’agrandit, le propriétaire du terrain, toujours aussi cerné de végétation, toujours bordant la route d’un hameau, décide d’adjoindre un nouveau mobile-home au premier, afin d’agrandir son logement pour accommoder ses deux enfants. Patatras, c’est l’erreur.

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Ah, décidément, inépuisables sont les joies de devenir propriétaire en France !

En effet, lorsque vous y fondez une entreprise, reprenez un commerce, lancez une nouvelle activité ou, plus spécifiquement, lorsque vous y achetez un bien immobilier,vous le faites toujours avec un associé qui ne participe pas au capital, qui ne vous donnera jamais le moindre conseil, mais auquel vous devrez verser des dividendes juteux et dont les décisions seront toujours sans appel, et comme s’il s’agissait de l’actionnaire majoritaire.

Cet actionnaire intrusif, encombrant et grossier, c’est l’État. Lui et son administration pléthorique seront toujours là avec vous, surtout lorsque vous n’en avez pas besoin, pour vous dire ce que vous n’avez pas le droit de faire avec votre propriété privée. Ici comme dans d’autres cas, l’État est donc bien vite intervenu.

En l’espèce, c’est le maire qui s’est prestement saisi de l’affaire pour rappeler au propriétaire que même si aucune gêne n’existe, il commet une infraction et qu’il devra donc être poursuivi et puni.

Pensez donc ! Quand bien même la situation du terrain n’a absolument rien de clair au regard du cadastre, l’arrivée de ce second mobile-home constitue, à en croire le maire qui a lancé la procédure, un affront suffisamment insupportable au patrimoine local qui justifie amplement qu’on empêche cette nouvelle implantation. En mai 2014, il appelle donc un contrôleur de la Direction des territoires qui s’empressera de refuser tout net tout agrandissement du logement.

Ouf. Le patrimoine local de Charrais, dans la Vienne – internationalement reconnu – est sauf. Le propriétaire des lieux, légalement castré de ses droits parce qu’il a le mauvais goût de choisir des mobile-homes plutôt que de jolies petites maisonnettes de briques et de tuiles oranges, devra donc retirer son fatras et aller se faire voir aussi loin que possible ailleurs. La lutte contre le mal-logement pourra attendre.

justice !

Oh, bien sûr, j’entends déjà les fiers défenseurs de la Loi, la Dure Loi, s’écrier qu’après tout, si c’est la Loi, il faut bien la respecter ou, sinon, nous vivrons rapidement dans une véritable anomie putride où les chats coucheront avec les chiens et les forts martyriseront les faibles, tralala. Ces fiers défenseurs oublient un peu vite que si pour les chats avec les chiens, le doute est encore permis, en revanche il ne l’est pas pour le fort qui martyrise déjà le faible de façon assez régulière, à tel point que cela devient même la marque de fabrique de cette République. En outre, ces fiers défenseurs oublient tout aussi vite que la loi est censée chercher, avant tout, à minimiser les dommages pour les individus et la collectivité, et, ultimement, qu’elle est établie pour s’assurer que les uns et les autres vivent sinon harmonieusement, au moins pacifiquement.


Or, avec ce genre de décisions, qu’observe-t-on ?

Déjà, qu’en terme de paix publique, la situation apparaît moins paisible après l’application de la Loi qu’avant : une famille va devoir trouver à se loger ailleurs, des avocats et un tribunal, régulièrement engorgés, ont été occupés à traiter cette affaire, un maire a passablement occupé son temps sur cette histoire plutôt que sur d’autres. Le bénéfice pour la société ou la collectivité en général et pour les individus en particuliers semble très difficile à établir.

Difficile, en outre, d’établir la liste des préjudices commis et des victimes qui peuvent s’en réclamer. Là encore, les fiers défenseurs de la Loi, Dure Loi, rappelleront que si le maire a lancé la procédure, c’est bien qu’une victime existe, et ici, qu’il s’agit du « patrimoine local », appellation aussi vague que commode pour y fourrer absolument tout et n’importe quoi permettant finalement à l’édile de choisir si les poursuites sont nécessaires ou pas. L’arbitraire aidant, ce « patrimoine local » promet de s’étendre ou de se rétrécir au gré des maires et des vicissitudes des besoins communaux (ou électoraux, plus probablement).

Que voilà une victime commode, qui s’adapte aux besoins ! À tel point que si l’on écarte cette dernière parce qu’un peu trop commode, que reste-t-il sur le banc des plaignants ? Personne. Pas un citoyen du hameau, pas un voisin ne semble suffisamment gêné par ces mobile-homes pour se porter partie civile. Le fournisseur d’électricité semble heureux de toucher paiement de ses factures, celui d’eau aussi. Les commerçants locaux ont probablement vu la famille dépenser quelque argent chez eux depuis qu’ils sont installés, et je doute qu’ils s’en soient offusqués. L’État, même, a très certainement récupéré des taxes, impôts et autres contributions pour la présence de cette famille en ce lieu.

À part ce satané « patrimoine » qu’on ne semble ressortir que pour mieux formoler le pays, où diable se cache donc la victime ?

Pour tous les citoyens, ceux qui payent des impôts, ceux qui participent effectivement à la société française, ceux qui ont d’autres buts, dans leur vie, que celui d’aller régler, règlementer, calibrer et contrôler la vie des autres, la vérité apparaît d’elle-même : de victime, il n’y en a aucune avant le passage de la Loi. Après, en revanche, c’est plutôt la bousculade : il y a bien sûr cette famille qui ne pourra donc pas habiter sur un terrain dont elle est propriétaire, et, par voie de conséquence, la commune elle-même qui perdra ce que ces administrés, boutés hors de son logement, pouvaient apporter.

Aucune victime avant, tout plein après ? Une propriété privée qui n’existe finalement pas vraiment ? Décidément, la vie en République du Bisounoursland est pleine de surprise…

Socialisme

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